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«L'État va parfois trop loin dans les restrictions de libertés»

Dernière mise à jour : 5 juil. 2022

entretien donné au figaro le 3 février 2021

ENTRETIEN - Membre de la majorité présidentielle, la députée (Agir-Ensemble) du Nord estime que le gouvernement a «du mal à rendre des comptes» de sa gestion de la crise sanitaire. Elle réclame des mesures plus proportionnées alors que «certains Français n'en peuvent plus» des restrictions.


Par Tristan Quinault-Maupoil, Publié le 03/02/2021



«Si l'exécutif ne sait pas s'autoréguler et retenir son pouvoir c'est au parlement de réaffirmer le sien», affirme la députée Valérie Petit.

LE FIGARO. - Vous avez déposé une proposition de résolution pour obliger l'exécutif à évaluer les conséquences des restrictions sanitaires sur les libertés publiques. L'État est-il allé trop loin ?

VALERIE PETIT.- Oui, l'État va parfois trop loin dans les restrictions de liberté. C'est la raison d'être de ma proposition de résolution «impact et proportionnalité des mesures d'urgence sur nos libertés». Certains Français, comme les restaurateurs, les étudiants ou encore les indépendants n'en peuvent plus, cela pose une question autour de l'acceptation de ces mesures alors même que l'épidémie n'est pas terminée. L'état d'urgence sanitaire a été déclaré en mars, ce qui fait quasiment 320 jours d'état d'urgence. L'état d'urgence sanitaire, rappelons-le, n'est pas une obligation mais une facilité et une concession provisoire faite par le Parlement au pouvoir exécutif. Un état d'urgence n'est pas censé s'éterniser, or ça s'éternise. Ça commence à devenir une nouvelle normalité. Pour le Parlement ça veut dire peu de contrôles, car il y a beaucoup d'ordonnances. Ça veut aussi dire peu de débats et un peu moins de démocratie. C'est quand même un problème ! Chaque liberté donnée par les Français coûte très cher. Et j'ai très peur que nous perdions le goût de la liberté.

Il faudrait lever certaines restrictions ? On a quand même plus de 48 libertés qui ont été fortement restreintes depuis un an, ce n'est pas rien. À dix reprises, le Conseil d'État a dit au gouvernement qu'il allait trop loin. Pour les lieux de culte, les libertés de manifester, pour les déplacements à vélo, pour le port du masque dans des endroits où ce n'était pas nécessaire, etc. Certaines restrictions de liberté ne sont pas proportionnées au regard du risque sanitaire. On voit apparaître des signaux faibles d'un risque de désobéissance civile, ce qui me fait dire que certaines restrictions ne sont pas tenables sur le long terme. Or, en tant que parlementaire, en vertu de l'article 34 de la Constitution, je suis garante des libertés et des droits civiques, et je suis censée contrôler le gouvernement, en vertu de l'article 24. Celui-ci semble avoir du mal à rendre des comptes. Il ne sait pas se réguler lui-même. Donc je demande que le premier ministre vienne à la tribune et rende des comptes à chaque fois qu'un projet de loi porte sur l'urgence sanitaire. Il faut une nouvelle pratique de l'état d'urgence. Je veux les obliger à cette nouvelle hygiène. C'est le minimum exigible à l'égard de l'exécutif. Car la meilleure réponse à la désobéissance civile c'est de faire refonctionner la démocratie représentative correctement. Si l'exécutif ne sait pas s'autoréguler et retenir son pouvoir c'est au Parlement de réaffirmer le sien. Je demande donc que chaque futur projet de loi d'urgence sanitaire soit assorti d'une évaluation d'impact sur nos libertés et d'une démonstration de sa proportionnalité. Les restrictions de liberté sont trop larges par rapport au coût social et psychologique, qui ne tue pas tout de suite mais qui va gâcher des vies Valérie Petit, députée Agir du Nord

Vous n'avez pas pris part au vote le 20 janvier dernier pour proroger l'état d'urgence sanitaire... Il n'était pas question de voter contre, mais j'ai estimé qu'il n'y avait pas la possibilité d'un débat. Je n'ai donc pas voulu prendre part au vote. J'espère que dans les prochains mois le Parlement va se réveiller. Ce serait une bonne nouvelle pour la démocratie mais aussi pour le gouvernement. Il vaut mieux que la voix des français s'exprime dans l'hémicycle que dans la rue. Concrètement, quelles restrictions mériteraient d'être levées selon vous ? Aujourd'hui les restrictions de liberté sont trop larges par rapport au coût social et psychologique, qui ne tue pas tout de suite mais qui va gâcher des vies. Je rappelle que lorsque vous êtes pauvre, vous perdez huit années d'espérance de vie. Il ne faut pas choisir entre économie et santé, ni entre les jeunes et les vieux. Il faut une proportionnalité stricte. C'est l'option qu'a retenue le président de la République, en refusant le confinement. Je m'en félicite et m'y inscris totalement. Maintenant je veux que cette bonne pratique descende jusqu'au gouvernement et que l'on aille plus loin. Je pense que l'on peut se réapproprier l'extérieur, trouver des nouvelles habitudes respectueuses de la distanciation, et offrir des moments de convivialité avec des moments culturels respectueux du risque sanitaire dans les semaines à venir.

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